Lettres de J.R.R Tolkien - Un voyage fantastique dans sa correspondance

Par LaPlume

Il y a un petit bout de temps je vous parlais des lettres qu'il écrivait à ses enfants pour Noël, mais tout au long de sa vie, John Ronald Reuel Tolkien a entretenu une importante correspondance avec ses amis, sa famille, ses éditeurs, des collègues et même des fans. Aidé par Christopher Tolkien, Humphrey Carpenter, son biographe officiel, a réuni puis sélectionné une partie de ces écrits. Un recueil de plus de 350 lettres, un Précieux et surtout un long chemin à travers la terre du milieu et au delà !

Lettres pour la Tolkien Reading Day

Un livre pour les gouverner tous

Le recueil est donc composé de plus de 350 lettres (envoyées ou non) et brouillons que Tolkien écrivit entre 1914 et 1973, année de sa mort. Un sacré pavé de plus de 800 pages si l'on ne compte pas les notes de fin d'ouvrage. Un livre qui peut faire peur de prime à bord.

Ces précieuses lettres nous permettent de faire connaissance avec l'homme et avec son œuvre. Un homme affectueux avec sa famille, fidèle en amitié et intègre. Un homme qui n'hésite pas à envoyer paître un éditeur allemand désireux de faire publier Bilbo mais qui, en 1938, lui demande au préalable s'il a des origines aryennes (le nom Tolkien étant d'origine allemande). Un homme qui fait tout pour que Disney ne s'empare jamais de son œuvre. ^^
On en apprend d'ailleurs beaucoup sur ses opinions puisqu'il aborde de nombreux sujets, de la théologie à la botanique en passant par sa grande passion, les langues évidement.

On peut difficilement oublier que Tolkien était philologue au vu des innombrables lettres où il est question de vieil anglais, vieux norois, langue elfique ou runes naines. On trouve même une carte postale entièrement rédigé dans le système runique utilisé dans « Bilblo le Hobbit »

Tolkien et les Runes Naines de Bilbo le Hobbit
Une carte postale rédigée en runes naines pour une romancière fan du Hobbit

Les échanges épistolaires concernant ses écrits, qu'il s'agisse de courrier à son ami C.S Lewis ( Le Monde de Narnia ), à son fils Christopher ou à ses éditeurs, sont vraiment passionnants. On sent qu'il prend très à cœur leurs remarques et son perfectionnisme saute tout de suite aux yeux. Il parle sans cesse de remanier ses textes même après publication, reprend un éditeur qui a mal orthographier un mot elfique et j'en passe. On comprend mieux pourquoi nombre de ses écrits étaient inachevés.

Je suis entrée dans l'univers de Tolkien par « Le Silmarillion » et ses lettres m'ont beaucoup aidé à comprendre certaines choses qui m'avaient échappées à l’époque. C'est passionnant de deviner ou d'en apprendre plus sur ce qui l'a inspiré ; les paysages, la nature, les contes et les légendes ou encore la religion et les guerres auxquels il a été confronté. Les nombreuses lettres à son fils Christopher, mobilisé lors de la seconde guerre mondiale, nous éclaire d'ailleurs pas mal sur « Le Seigneur des anneaux ».

Bien des lettres nous en apprennent plus sur les personnages. La complexité du personnage de Gandalf et l'amour que Tolkien porte aux Hobbit m'ont particulièrement marqué. Bien qu'il soit capable de disserter durant plus de 30 pages sur l'histoire et l'essence même des elfes, la façon dont il parle par exemple de Sam Gamgie est vraiment touchante.

Un long voyage en terre du milieu

Chaque lettre est accompagnée d'un petit texte pour en situer le contexte et elles sont toutes numérotées pour permettre aux lecteurs les plus curieux et désireux de ne rien rater, de se référer aux notes à la fin du livre. Ce qui pourra être gênant au début, mais on prend vite l'habitude de naviguer entre les lettres et les notes explicatives parfois bienvenues. Quand Tolkien site le Beowulf en  vieil anglais dans le texte, on est bien content d'avoir une traduction.
Je me demande s'il peut être agréable à lire quand on a jamais ouvert un livre de Tolkien ?
Bien entendu on peut ignorer les notes et se consacrer à la lecture des missives mais c'est vraiment dommage.

J'ai mis un temps fou à lire ce livre que j'ai commencé en été 2015... oui oui je sais... je l'ai trouvé passionnant et le problème est venu du fait que, dès qu'une information me permettait de comprendre un élément du « Silmarillion » par exemple, j'avais besoin d'aller reprendre ce dernier pour relire des passages, faire des recoupements etc. Je l'ai un peu pris comme un sujet d’étude. ^^
Et puis, le livre ne quittait pas ma table de chevet ce qui me permettait de lire quelques lettres, de temps en temps, de le laisser, avant de le reprendre. Sans compter que le chat ne voulait pas toujours me le rendre... Du coup ma lecture n’avançait pas très vite.

Mon chat aussi aime Tolkien
Mon prééééééciiieeeuuux !!! =^^=

Mais vraiment, je le recommande à tous les fans de l'univers de Tolkien. Non seulement parce qu'on en apprend beaucoup sur l'homme mais aussi sur la façon dont il a pensé et créer son œuvre.

66. Extrait d'une lettre à Chistopher Tolkien

6 mai 1944 (FS 22)

(…) nous essayons de vaincre Sauron avec l'Anneau. Et nous réussirons (semble-t-il). Mais le prix à payer est, comme tu le sais, de faire de nouveaux Sauron, et de lentement transformer en Orques les Hommes et les Elfes. Non pas que dans la réalité les choses soient aussi nettes que dans une histoire, et nous avons pris le départ avec de nombreux Orques à nos côtés. [...] Et voilà où tu en es : un Hobbit parmi les Urukhai. Porte ton hobbitude dans ton cœur, et songe que toutes les histoires ressemblent à cela quand on est dedans. Tu es dans une très grande histoire ! Je pense également que tu souffres d'un besoin d' « écrire » réprimé. C'est peut-être ma faute. Tu as un peu trop hérité de moi, de mon mode de pensée et de réaction particulier. Et comme nous sommes si proches, cela s'est révélé assez puissant. Peut-être cela t'a-t-il inhibé. Je pense que si tu pouvais commencer à écrire et à trouver ton propre mode, ou même (pour commencer) imiter le mien, tu verrais que cela soulage beaucoup. Je devine, parmi toutes tes souffrances (quelques-unes étant purement physiques), le désir d'exprimer ton sentiment sur le Bien, le Mal, le juste et l'infâme, en quelque sorte : le rationaliser, et l'empêcher de seulement suppurer. Dans mon cas, cela engendré Morgoth et l'Histoire des Gnomes.

Lettres (de J.R.R. Tolkien) - Traduction de Vincent Ferré et Delphine Martin - Pocket

P.S : En 2014, France Culture avait consacré une émission à la vie et l’œuvre de J.R.R Tolkien . Rediffusée il n'y a pas longtemps, je vous conseille d'aller y jeter une oreille, ne serait-ce que pour entendre Tolkien chanter une chanson Hobbit, ça vaut le détour !
Et sinon, aujourd'hui c'est le Tolkien Reading Day  !

Par LaPlume, admin du site